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On dit que l’expatriation pourrait jouer le rôle d’une thérapie. Cette hypothèse confirme la pensée du penseur allemand Hermann von Keyserling, lorsqu’il affirmait dans son Journal de voyage d’un philosophe : « Le chemin le plus court vers soi-même est de parcourir le monde. » Pour beaucoup, le défi d’une vie au loin peut apparaître comme un vrai chemin initiatique ou l’ultime épreuve pour se confronter à ses limites personnelles. Il n’est pas sûr pourtant que l’aventure tourne si facilement au succès car, elle demande des ressources. Or, chaque individu est différent.

PLUS LIBRES, LES EXPATRIÉS ?

En partant, les expatriés s’affranchissent de beaucoup de choses, comme leurs repères culturels ou certains schémas familiaux. Avec le changement de décor culturel, l’expatriation expose à de nouvelles normes et de nouveaux cadres de pensée. Selon certains chercheurs américains, le phénomène enclencherait un processus de d’auto-discernement accru : entendez par là, une meilleure prise de conscience de soi-même et de son potentiel. Autrement dit, en se confrontant à l’inconnu, l’individu découvre des différences qui l’amènent à faire des choix qui le recentrent sur ses vraies valeurs.

Considérée sous cet angle, l’expatriation est indéniablement synonyme d’évolution personnelle. Elle permettrait en particulier de mieux se déterminer par rapport à ses choix personnels, notamment au niveau professionnel.

Ces études américaines tendent aussi à montrer que les bienfaits de l’expatriation s’acquièrent sur le long terme, car c’est un séjour prolongé dans un pays étranger qui provoque ces transformations. Plutôt que de multiples petits séjours, il serait donc conseillé de séjourner longtemps dans un même pays pour provoquer l’apparition de cette forme de maturité.

Le stress important d’une expatriation serait donc compensé sur la durée par une plus grande stabilité personnelle et une nouvelle capacité de s’affirmer vis-à-vis des autres. On peut y voir un parallèle avec la thérapie qui débarrasse de schémas de pensée obsolètes et mène l’individu à se réinventer. Une thérapie et une expatriation ont en commun de mettre l’individu à distance des schémas parentaux qui l’ont façonné : la distance est physique dans l‘expatriation et psychologique dans la thérapie.

RÉSISTE T’ON TOUJOURS À L’EXPATRIATION ?

Pour qu’une expatriation aboutisse à un phénomène de maturation personnelle, les conditions dans lesquelles elle se déroule doivent permettre aux individus d’assimiler la culture du pays d’accueil.
La seule stabilité psychologique ne serait pas, en effet, pas l’unique facteur à considérer.

Ainsi, les expatriés dont le contexte professionnel soutient les adaptations, sont plus enclins à développer ce processus de maturité qui les mène à s’épanouir. Les études américaines semblent, dans ce sens, davantage concerner la réalité de l’expatriation économique des hommes, qui se gratifie d’une évolution sociale et d’un enrichissement intellectuel et culturel certain.

Mais qu’en est-il de leurs conjointes, qui très souvent dépourvues d’occupation professionnelle, se retrouvent confrontées à une déperdition identitaire ? La période d’expatriation coïncide alors davantage à un moment de repli sur la cellule familiale et/ou sur la communauté d’expatriés du pays d’origine. Elle ne privilégie ni l’acculturation, ni l’affirmation de soi-même par la rencontre de la différence. L’expatriation correspond dans ce cas, à une période de transition qui s’apparente à celle d’une perte d’emploi ou d’un divorce. Contrairement à celle de l’homme, elle marque une pause dans l’évolution personnelle de sa conjointe qui la mène à une moindre conscience de soi.

Que penser aussi des expatriés français confrontés à des conditions d’adaptation particulièrement difficiles sur certaines destinations dans les pays émergents ? Quand la pauvreté, l’insécurité ou le manque d’infra structures créent un stress permanent chez les individus, l’expatriation les mène certes, à repousser leurs limites, mais non sans dommage pour leur santé. Leurs fréquents va-et-vient avec leur pays d’origine sont là pour en témoigner : les facultés d’adaptation des individus ne sont pas illimitées.

L’expatriation est déconseillée en cas d’antécédents psychiatriques ou de troubles anxieux déjà présents. Il est possible d’anticiper les effets du stress et de solliciter l’opinion d’un thérapeute pour expatrié, avant de se projeter dans une vie à l’étranger.

Tous les expatriés sont, à la base, heureux de partir, mais le choc culturel à l’arrivée peut exposer à une désorientation complète. De nombreux Français de l’étranger ayant fait face à un rapatriement ou qui se sont durement confrontés aux réalités de l’acculturation en témoignent. S’expatrier n’est pas toujours un révélateur personnel qui permet de se transformer comme on le voudrait. Il est préférable de fait, de régler certains problèmes personnels avant un départ, plutôt que d’y retrouver confronté à l’arrivée.

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